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lettre d'information

couverture de PRÉFACE À LA TRANSGRESSION
64 pages - 12,00 €
Éditions Lignes

PRÉFACE À LA TRANSGRESSION

Présentation de Francis Marmande

Paru en 1963 dans la revue Critique, une année après la mort de Georges Bataille, ce texte d’hommage du jeune Michel Foucault inaugure la postérité de Georges Bataille en tant que philosophe.

Parution programmée à l’occasion du cinquantenaire de la mort de Georges Bataille (1897-1962).

On pourrait en douter aujourd’hui : à sa mort, en
1962, Georges Bataille reste quasiment inconnu.
Quelques dates marqueront sa reconnaissance
posthume. On le sait de la décade de Cerisy, en
1973, « Artaud / Bataille, pour une révolution
culturelle ». On le sait des deux numéros de la
revue L’Arc (fin des années 1960 – début des
années 1970). On le sait moins du numéro que
la revue Critique a publié dès l’été 1963, soit
un an après sa mort, « Hommage à Georges
Bataille », que de « plus bruyants », comme dit
Francis Marmande, auraient « hissé à hauteur de
manifeste ».

C’est dès ce numéro, en effet, que sont mesurées
l’ampleur et la diversité de l’apport de
Georges Bataille à la littérature et à la pensée. Ce
qui n’allait pas de soi : la publication des Œuvres
complètes
(12 vol.) ne commencerait que dix ans
plus tard, lesquelles porteront enfin au jour un
continent inconnu de tous – tant d’écrits oubliés
ou inédits ; pas loin sans doute du tiers des textes
qu’elles réunissent.

Les contributeurs de ce numéro de Critique
ne les ont pas attendues pour en attester déjà.
Des écrivains : Raymond Queneau, Michel Leiris,
Philippe Sollers ; des écrivains-philosophes :
Roland Barthes, Maurice Blanchot, Pierre
Klossowski ; des philosophes : Michel Foucault,
Jean Wahl ; un ethnologue : Alfred Métraux.
À peu près tous les domaines dans lesquels
Georges Bataille s’est illustré y sont représentés. On peut
tenir ce numéro pour constitutif de la postérité
de Bataille ; il l’a déployée et articulée. Tout ce
qui s’est écrit depuis cinquante ans que Bataille
est mort lui doit plus ou moins.

La contribution de Michel Foucault à ce
numéro emblématique de Critique sera décisive
 : Foucault est certes loin d’avoir encore
l’aura des autres contributeurs (ayant alors
encore peu de livres à son actif, sinon Histoire
de la folie à l’âge classique) ; pour autant, la
jeune génération de la philosophie ne pourra
pas ignorer que Bataille est aussi un philosophe,
et pas seulement un écrivain, comme on
sera encore trop longtemps enclin à le penser.
Un philosophe d’une étrange sorte, soit ; parmi
les plus considérables cependant. On peut le
dire aussi simplement : l’analyse élogieuse
de Michel Foucault vient corriger celle, stigmatisante,
énoncée par Jean-Paul Sartre en
1943, soit 20 ans plus tôt.

Texte admirable (admirablement écrit)
de Michel Foucault (ses propres motifs y
sont abondamment déployés) autant que sur
Georges Bataille (sur lequel il prend appui par
le même mouvement qu’il en analyse l’œuvre et
la pensée) ; où il est beaucoup et indissolublement
question de la sexualité et de Dieu : « Ce
qu’à partir de la sexualité peut dire un langage
s’il est rigoureux, ce n’est pas le secret naturel de
l’homme, ce n’est pas sa calme vérité anthropologique,
c’est qu’il est sans Dieu ; la parole que nous
avons donnée à la sexualité est contemporaine par
le temps et la structure de celle par laquelle nous
nous sommes annoncés à nous-mêmes que Dieu
était mort.
[…] Mort qu’il ne faut point entendre
comme la fin de son règne historique, ni le constat
enfin délivré de son inexistence, mais comme l’espace
désormais constant de notre expérience.
 »
Où il est question, bien sûr, de la transgression
(affirmation non-positive dit-il, qui n’affirme
rien) : « Peut-être un jour apparaîtra-t-elle aussi
décisive pour notre culture, aussi enfouie dans
son sol, que l’a été naguère, pour la pensée dialectique,
l’expérience de la contradiction.
 » De la
philosophie en tant que telle, enfin, en quoi il se
tient aussi près que possible de l’expérience que
Georges Bataille a faite de la pensée et invite à
faire après lui : « C’est au cœur de cette disparition
du sujet philosophant que le langage philosophique
s’avance comme en un labyrinthe, non
pour le retrouver mais pour en éprouver (et par
le langage même) la perte jusqu’à la limite, c’est-à-
dire jusqu’à cette ouverture où son être surgit,
mais perdu déjà, entièrement répandu hors de luimême,
vidé de soi jusqu’au vide absolu, – ouverture
qui est la communication.
 »

Michel Foucault dira plus tard dans un entretien
 : « Klossowski, Bataille, Blanchot ont été pour
moi très importants. Et je crains bien de n’avoir
pas fait dans ce que j’ai écrit la part suffisante
à l’influence qu’ils ont dû avoir sur moi.
[…] Je
me suis dit que finalement on n’a peut-être pas
montré suffisamment la dette qu’on leur doit.
 »
C’est pourtant Michel Foucault qui sera à l’initiative
de la publication des Œuvres complètes de
Georges Bataille, et qui en préfacera le premier
volume, dix ans plus tard.

Il nous a paru essentiel de redonner ce texte
essentiel à lire, à l’occasion de la célébration du
cinquantième anniversaire de la mort de Bataille.

Recension par Jean-Clet Martin (5 février 2012)

Éditeur : Éditions Lignes
Prix : 12,00 €
Format : 11 x 18 cm
Nombre de pages : 64 pages
Édition courante : 16 février 2012
ISBN : 978-2-35526-091-9
EAN : 9782355260919